Tremplin du Cri, Claus TINTO à l'écoute...
lundi 20 mai 2013
M T Peyrin 2012 | Graffitis Urbains
Pour Claus TINTO
Il y avait alors, dans toute réalité offerte
aux sens, quelque chose de nocturne.
L’ombre paraissait plus présente que le jour.
C’était elle qui faisait signe. Les mots s’y
cherchaient, je crois, avant de se trouver.
Claude Louis-Combet , Ouverture du Cri ,
Cadex Editions,1992, p.9
Comment se rapprocher de la cabane en bois, en mousse et laine de pierre où deux jeunes hommes ont rouvert violemment le cri universel, cherchant peut-être à réveiller tant soit peu, les sourds de famille, les sourds du pouvoir… J’écris sourds de famille comme on dit sourds de naissance. Une difficulté récurrente d’échange humain d’égal à égal, dans l’entre-siens primordial, un abandon trop précoce de patience et de bienveillance, aux temps fragiles de construction des êtres, une lutte aveugle, avec risque vital contre le sens commun et l’indulgence réciproque. Une atavique interdiction de dire les vérités qui sont pourtant le ferment et l’antidote de tous les lâchages perpétrés par la mise monde elle aussi universelle. J’éprouve une immense empathie à l’égard de ces deux là, parmi tous, enfants du siècle, « tombés de haut », sans armure ni casque intégral contre les mots qui entre-tuent, qui marquent et manquent aussi, cruellement… Comment dire ? Comment ne pas dire ?...
Ne reste parfois, au final ou avant tout recommencement ..., seulement la révolte, l'action jusqu’au-boutiste ultra- incarnée, la sacralisation ultime passant par la sublimation hors-piste d’une explosion débondée de la douleur. Recherche amplifiée dans la déflagration annoncée et assumée de la raison ordinaire. La poésie et la musique aux accents outrés, déjantés ont été ici confinées pour pouvoir être confiées à l’écoute attentive – un défi subtil que j’encourage et c’est moindre remerciement pour la leçon de courage et de confiance donnée. Comment ai-je pu pénétrer sans crainte dans ces quelques mètres cubes où deux frères s’entraînent à apprivoiser le cri intégral avec des instruments qu’ils qualifient de sataniques ? Je l’ignore, cela m’étonne encore, mais j’ai agi d’instinct, en rencontrant Lucas OTTIE le 16 Mars dernier au Tremplin Poétique du Printemps, persuadée que la noirceur affichée, recouvre ici et de fait, une lumière trop aveuglante pour la plupart des adultes amnésiques de leurs peurs les plus profondes.
Comment Faire Tremplin à l’insupporté, comment trouver Tendresse sous le Cri ?
La traversée de la nuit dont a tant parlé Charles JULIET dans ses écrits, se décline avec plus ou moins de drame et d’intensité dans toutes les générations successives où l’absence et la défection du lien verbal solidaire n’est pas le moindre écueil. Lorsqu’ il s’agit de dépasser les seuils de survie morale et physique, les rites sociaux de passage aujourd’hui confus, la jeunesse qui crie, qui refuse de réfréner sa profonde déception sur la gouvernance actuelle du destin collectif de la planète, est une jeunesse vivante qui n’accepte pas les règles du jeu et les idées reçues sur le « moyen de s’en sortir ». Loin de l’exaltation, la jeunesse d’ici se noie dans le non sens, saturée par la matérialité redondante et inaccessible, fourvoyée dans les impasses de l’intégration sociale aux règles sauvages et élitistes. Tous orphelins au milieu des décombres de la guerre des nerfs se rêvant rescapés...
Le jeune homme qui a mis au monde ce cri né de fratrie, est devenu, il n’y a pas de hasard…« assistant funéraire »… « croque-mort » pour gagner sa propre vie. Son personnage public Claus TINTO, écrit pour comprendre pourquoi il écrit et joue de la musique de cette façon apparemment brutale. Il aura besoin de temps pour élaguer ses mots au milieu du vacarme ambiant et dégager sa voix singulière de la gangue des possibles.
Il offre son poème KIMAMILA au cœur d’une authenticité qui ne trompe pas et que j'aime. C’est à prendre ou à laisser. Une leçon de courage, au profit de ceux et celles qui ont pu expérimenter que la transe verbale et sonore lavent le corps entier de ses miasmes anciens et que c’est nettement moins dangereux pour soi et pour autrui. Le prix à payer du dépit et du répit reste donc abordable humainement. Avec ce morceau de poésie sonore maintenant abouti, le lecteur ou la lectrice de passage pourra raccorder deux versions d’un même poème et choisir celle qui l’aidera le mieux à faire connaissance avec une écriture en devenir .
C’est Cadeau-Couleur-Cri!
Avant d’être une métaphore, la nuit
fut une sensation. Celui qui écrit s’en souvient
encore dans la confusion intime de ses
tissus charnels. Celui qui use de nuit pour
essayer de dire le fond de son expérience et
la suprême qualité de son amour – celui là
n’a pas oublié le saisissement qui s’emparait
de son être, aux détours d’enfance,
lorsque le jour déclinait et que l’ombre
s’effusait de toute part. C’était un autre monde
qui advenait – et peut-être bien le seul véritable,
le fondement et comme l’origine…
Claude Louis-Combet, Ouverture du Cri,
Cadex Editions,1992, p.13
MT Peyrin 20 Mai 2013 | 15h
Pour écouter la version KIMAMILA du Tremplin MARS 2013, avec l'accompagnement improvisé des élèves du Conservatoire de Musique , cliquer ci-dessous :
Téléchargement LECTURE de KIMAMILA CLAUS TINTO
Pour écouter la dernière version électro-acoustique KIMAMILA
MAI 2013, cliquer ci-DESSOUS
Qui a mis ça
Ici et ça là ?
Qui a mis ça ?
Qui m'a mis là ?
Si moi il y a.
Qui m'a mis là ?
Qui a mis là
Le lit, les lilas ?
Qui a mis là ?
Quel ami me lit ça ?
Quelle lie mon âme avala ?
Quel homme las !
Quelle maladie m'a mis là ?
Quel mal a dit "Aimes-la" ?
Che bella !
Quel amas d'amis m'a mis là me mêlant à mille âmes assimilant des lois ?
Qui m'a mis là ?
Qui m'a mis la ?
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Qui a dit quoi ?
Qui voit comme moi ?
Qui a pris quoi ?
Tu ne vois pas
Les mêmes choses que moi.
Tu ne dois pas.
Ma mie, lis moi
La même page trois fois,
Et lis-la moi là.
Lis-la moi là.
Lis-la moi là.
Quel ami me dit ça ?
Quelle femme a dit je n'l'ai pas ?
Quel homme l'a ?
Quelle maladie, dis-le moi !
Combien te reste t-il de mois ?
Qui l'a mis là ?
Quel mâle a mis en dedans de toi l'oedème démoniaque qui l'appellera Papa ?
Est-ce que c'est moi ?
Est-ce que c'est moi ?
C.T| L.O
Pour accompagner cette note une vidéo INA Otis REDDING cliquer ICI
Sur scène à Londres, 16 avril 1967 en public au Marquee club, accompagné par les Booker T. and the MGs . Otis REDDING chante "Satisfaction" et "Try a little tenderness".
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